Les théories, dit Péladan, n'expriment peut-être que des tempéraments. Si, en matière doctrinale, l'assentiment ou l'inadmission paraissent procéder d'un, rigoureux enchaînement de considérations justificatives, le fait que partisans et négateurs se recrutent parmi des valeurs intellectuelles équivalentes laisse admettre qu'à la racine de toute conviction il y a un facteur subjectif.

Dans le domaine pratique, le doute quant à l'efficacité de telle méthode, de tels comportements, de tels exercices, ou quant aux aptitudes personnelles de l'intéressé à ces-disciplines se traduit soit par un essai loyal, soit par de l'atermoiement, selon qu'il est prédisposé au laisser-aller ou ardemment désireux de résultats.

Ces deux tendances alternent dans la plupart des cas.. Il y a pour chacun de nous, des périodes où l'entrain, la combativité, l'énergie atteignent un niveau, une intensité, tels que nous n'hésitons pas à nous dépenser à tel ou tel essai, à nous évertuer à telle ou telle besogne, même si les probabilités d'aboutissement nous semblent faibles. A d'autres moments, l'évidence de ce que notre effort serait suivi d'effets, influe peu sur notre apathie.

Aux instants où le doute vous envahit, même s'il paraît procéder d'une série de réflexions, dites-vous bien ceci : L'origine profonde de toute pensée d'abandon n'est autre qu'une dépression organique ou psychique, laquelle donne lieu à un relâchement auquel nous sommes portés à chercher inconsciemment des motifs admissibles, pour tout dire : des excuses.

Mieux vaut chercher la cause exacte de toute dépression, de manière à y remédier et en éviter le retour.

Organiquement, ce peut être simplement de la fatigue (souvent due à une somniation mal réglée). Il peut s'agir de cet abaissement de l'état dynamo-génétique qui suit inévitablement les excès, de l'intoxication déterminée par une alimentation surchargée, d'insuffisance respiratoire ou de stases vasculaires, fréquentes chez les sédentaires qui ignorent la culture physique. Moralement, quelque, incident ramenant le souvenir d'échecs passés, quelque lecture malencontreuse, une circonstance, un spectacle, un mauvais exemple, une parole pernicieuse peuvent déclencher l'accès de désorientation qui suscite le doute et freine la volonté.

Après avoir recherché et discerné l'origine réelle de la crise de doute, de fléchissement, ayez recours au remède immédiat qui s'impose : un temps de repos. Favorisez par le silence, l'immobilité, la méditation, j'isolement, le retour de votre maximum de lucidité et de détermination. Lisez et relisez les passages de ce livre qui vous stimulent le mieux. Ne manquez pas, d'autre part, de prendre les mesures nécessaires pour raréfier et abréger les dépressions auxquelles vous êtes exposé.

Ne laissez pas une seule fois le trouble intérieur vous dominer. Opposez-lui invariablement une tactique réfléchie, méthodique. Persistez dans cette voie en dépit de tout et de tous : vos pas sur le chemin du succès seront bientôt assez allègres, assez résolus, pour que vous puissiez considérer la bataille comme gagnée.